dimanche 15 mars 2009

La surmédiatisation du crime

Francis Heaulme, Michel Fourniret, Patrice Alègre, etc… Des noms qui nous sont familiers, tant ils ont fait les Unes de journaux et les premières parties de JT. Et non pas pour avoir mis fin à l’apartheid en Afrique, ou à des conflits au Moyen-Orient, mais pour avoir commis d’horribles crimes.
Les gens ont toujours été friands des faits divers, mais depuis quelques années maintenant , on remarque que les histoires les plus sordides sont devenues un véritable sujet de prédilection, pour la société, comme pour les médias. Une question nous vient alors : Y a-t-il une augmentation du crime, ou alors cela reflète-t-il tout simplement un intérêt malsain qu’a la société pour ces histoires ?
Les atrocités commises ces dernières décennies ne sont pas le reflet d’une société en déclin, l’Homme reste simplement fidèle à lui-même depuis des siècles, on le voit avec des personnages comme Gille de Rais au XVème ou encore Jack l’éventreur au XIXème. Alors pourquoi cette impression que les tueurs sont partout ?
Les médias prennent un malin plaisir à faire un véritable compte-rendu détaillé, minutieux, de chaque affaire criminelle, souvent au « goutte à goutte », pour maintenir le suspens et attiser la curiosité malsaine de la population. La presse écrite offre des informations précises, sur le criminel, les victimes ou encore les procès. Quant à la télévision, elle propose des téléfilms ainsi que des émissions telles que Complément d’enquête ou Faites entrer l’accusé. Ces affaires sont l’objet d’un rituel narratif, les récits sont mis en scène, voire théâtralisés pour répondre aux exigences voyeuristes des lecteurs et spectateurs. Il y a là un profond paradoxe : malgré un sentiment de dégoût envers les criminels et les atrocités qu’ils commettent, les gens veulent toujours plus de détails. Un numéro du magazine Le nouveau détective, de Juin 2003, propose un article sur une mère accusée d’avoir étouffé ses bébés, et offre en bonus « le journal intime de la mère meurtrière », de quoi bien occuper ses longues soirées d’hiver .
En voulant répondre aux attentes d’un lectorat exigeant, les médias quittent l’information au profit de la surmédiatisation. Ils génèrent une névrose collective, faisant croire à chacun que notre propre voisin cache peut-être son enfant dans une cave ou un nouveau-né dans un congélateur. L’engouement pour toute cette barbarie fait de ces criminels de véritable vedette médiatique. Ils provoquent une fascination des plus ambiguës, amenant même à se demander si ça ne va pas jusqu’à porter atteinte aux familles des victimes.
Ces nouvelles « vedettes » font alors les gros titres, catapultées à mi-chemin entre le statut de légende urbaine et de mythe. Un français moyen se souviendra sûrement plus de Michel Fourniret que de Nelson Mandela.
Les faits divers occupent 17% de la presse quotidienne nationale, 46% pour la presse quotidienne régionale, et plus de 50% pour l’audiovisuel. Les affaires criminelles y occupent une grande place. Les tueurs en série, par exemple, ne représentent que 1% de la population carcérale et pourtant, les médias laissent penser qu’ils sont presque omniprésents.Ils ne se contentent pas de relater les faits, ils les amplifient et génèrent cette fascination sans cesse grandissante du public, se retrouvant alors dans une situation d’interdépendance avec ce dernier.


Camille Hoeltzel


http://www.cairn.info/article_p.php?ID_ARTICLE=SR_018_0171

http://www.tueursenserie.org/enplus/Memoire_Blandine_Socio.pdf

http://www.tueursenserie.org

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